Arrière petit fils d'un maire de Marseille Alexis-Joseph Rostand (1769-1854), Edmond Rostand naît dans une famille aisée de Paris.
En 1880, son père, craignant les désordres de la Commune, amène toute sa famille, Edmond, sa mère et ses deux cousines dans la station thermale en vogue de Luchon. Hébergés d'abord dans le "chalet Spont", puis dans la "villa Devalz", ils font ensuite édifier la "villa Julia", à proximité du Casino.
Edmond Rostand passe plus de vingt-deux étés à Luchon, qui lui inspire ses premières œuvres. Il y écrit notamment une pièce de théâtre en 1888, Le Gant rouge, et surtout un volume de poésie en 1890, Les Musardises.
Il poursuit ses études de droit à Paris, où il s'était inscrit au Barreau sans y exercer et, après avoir un temps pensé à la diplomatie, il décide de se consacrer à la poésie.
En 1888, avec son ami Froyez, journaliste parisien, il se rend au champ de course de Moustajon : et de décorer leur équipage d'une abondance de fleurs des champs. Ils font sensation devant un établissement à la mode, le café Arnative, et improvisent en terrasse une joyeuse bataille de fleurs avec leurs amis. C'est ainsi que naquit le premier "corso fleuri", ayant traditionnellement lieu le dernier dimanche d'août à Luchon, et où le gagnant se voyait remettre une bannière.
Dans le train pour Montréjeau, son père fait la rencontre de Madame Lee et de sa fille Rosemonde Gérard, et les invite à prendre le thé à la villa Julia. Edmond se marie le 8 avril 1890 avec cette dernière, poétesse elle aussi, dont Leconte de Lisle était le parrain, et Alexandre Dumas le tuteur.
Rosemonde et Edmond Rostand auront deux fils, Maurice, né en 1891, et Jean, né en 1894. Edmond quitte Rosemonde en 1915 pour son dernier amour, l'actrice Mary Marquet.
Edmond Rostand obtient son premier succès en 1894 avec Les Romanesques, pièce en vers présentée à la Comédie-Française. Dans les années 1910, il collabore à La Bonne Chanson, Revue du foyer, littéraire et musicale, dirigée par Théodore Botrel.
Après l'insuccés critique de Chantecler, Rostand ne fait plus jouer de nouvelles pièces. A partir de 1914, il s'implique fortement dans le soutien aux soldats français.
Edmond Rostand meurt à Paris, le 2 décembre 1918, d'une grippe espagnole qu'il a peut-être contractée pendant les répétitions d'une reprise de L'Aiglon.
La première représentation de Cyrano de Bergerac, le 28 décembre 1897 à Paris, au Théâtre de la Porte Saint-Martin, lui apporte la gloire. Pourtant, quelques minutes avant la pièce, Rostand pressent un fiasco et demande pardon à la troupe de l'avoir entraînée dans « cette effrayante aventure ».
La pièce venait à point pour rendre le moral à une France traumatisée par la perte de l'Alsace-Lorraine, à la suite de la guerre franco-prussienne de 1870, et, hantée depuis par l'humiliation et l'esprit de revanche.
Son héros démontre avec panache que l'on peut, dans l'adversité, garder la tête haute et faire preuve d'un très grand sens de l'honneur, avec la plus haute élévation d'âme. Aussi, dès l'entracte, la salle applaudit debout, et même un ministre vient le trouver dans les coulisses, décroche sa Légion d'honneur pour la lui agrafer, et s'explique : « Permettez-moi de prendre un peu d'avance. » Et, au baisser de rideau, le public d'applaudir à tout rompre, vingt minutes durant.
À l'Acte IV, scène VI, un cadet de Gascogne se présente avec des titres de fantaisie, qui font explicitement référence à différents endroits situés autour de Luchon :
Baron de Casterac de Cahusac
Vidame de Malgouyre Estresc Lesbas d'Escarabiot
Chevalier d'Antignac-Juzet
Baron Hillot de Blagnac-Saléchant de Castel-Crabioules.
Par ailleurs, la scène du balcon serait, dit-on, inspirée d'un fait de jeunesse, le poète ayant effectivement aidé Jérôme Faduilhe dans sa cour, jusque-là infructueuse, à une certaine Marie Castain : il lui avait écrit ses lettres d'amour.
La pièce fut traduite en plusieurs langues et eut un succès universel. Le personnage de Cyrano, brillant représentant de l'« esprit français », est devenu un véritable archétype, au même titre que Hamlet ou que Don Quichotte, qu'il mentionne d'ailleurs dans la pièce.
Un opéra, Cyrano de Bergerac, fut composé par l'italien Franco Alfano (1876-1954) sur une adaptation du librettiste Henri Cain (1859-1937), représenté en 2005 au Metropolitan Opera de New York, avec Plácido Domingo dans le rôle titre, puis en 2006 à l'Opéra de Montpellier, avec Roberto Alagna.
En 1900, son nouveau drame, L'Aiglon, est lui aussi un succès et lui ouvre les portes de l'Académie française en 1901. Souffrant, il n'y est reçu qu'en 1904.
En 1910, sa pièce Chantecler est créée au Théâtre de la Porte Saint-Martin, avec Lucien Guitry dans le rôle titre, Constant Coquelin, pour qui le texte avait été écrit, étant décédé peu de temps auparavant. La particularité de cette pièce est que tous les personnages sont des animaux. Le grand rôle féminin, celui de la Faisane, est tenu par Simone (Simone Le Bargy).
On ne peut vraiment dire si cette pièce fut un triomphe ou un échec. La critique fut partagée et une partie du public dérouté. La pièce est en vers, comme tout le théâtre de Rostand, mais l'alexandrin est manipulé par l'auteur avec une telle virtuosité qu'il est déconcertant d'entendre des animaux s'exprimer dans une langue aussi sophistiquée. La lourdeur des décors et des costumes joue aussi un rôle : dans les années 1950, Roland Barthes écrit un article célèbre sur « les maladies du costume de théâtre » et prend ce spectacle précisément comme exemple de ce qu'il ne faut pas faire au théâtre.
Presque cent ans après la première, il est intéressant de reconsidérer la question de Chantecler, qui est une réalisation beaucoup plus audacieuse que celle de Cyrano ou de L'Aiglon. D'un point de vue scénique, la mise en scène est passionnante. Elle offre sur la scène parisienne une tentative de renouvellement et de modernisation qui, si elle n'a rien à voir avec les entreprises du théâtre naturaliste (André Antoine) ou symbolistes (Lugné-Poe), prend en compte ces avancées qu'elle digère à sa manière. Les animaux qui parlent au théâtre sont relativement rares. Il y avait bien eu Les Oiseaux d'Aristophane. Mais leur retour sur la scène de la Belle Époque a quelque chose de surréaliste et préfigure, d'une certaine façon, les collages de Max Ernst.
Pour l'histoire des spectacles, l'entreprise a aussi quelque chose de remarquable. C'est la manière dont l'événement est géré par la presse. En effet, en 1910, Rostand passe, pour beaucoup, pour le plus grand dramaturge français, et il est considéré comme une sorte de poète officiel de la IIIe République. Or il n'est pas très productif. Sa dernière création, L'Aiglon, remonte à 1900. Il existe une attente énorme, et la rumeur journalistique ne cesse d'enfler à propos d'une pièce mystérieuse. Rostand entretient volontairement le mystère. On assiste à une véritable campagne de presse à l'américaine. À la sortie, en 1910, les journaux sont plein d'articles, de reportages, de photographies, d'anecdotes et de caricatures. Commercialement, la pièce est loin d'avoir été un échec : il y eut un grand nombre de représentations à Paris, et des tournées internationales furent lancées, avec plusieurs distributions parallèles.
Principales OEUVRES :
1888 Le Gant rouge.
1890 Les Musardises.
1890 Ode à la musique.
1890 Les Deux Pierrots.
1894 Les Romanesques.
1895 La Princesse lointaine.
1897 Pour la Grèce.
1897 La Samaritaine.
1897 Cyrano de Bergerac.
1900 L'Aiglon.
1902 Un Soir à Hernani.
1903 Discours de Réception à l'Académie française le 4 juin 1903.
1904 Chantecler.
1908 Le Bois sacré.
1911 La Dernière Nuit de Don Juan.
1915 Le Vol de la Marseillaise.